MORNAC - LES AQUEDUCS DES LAQUAIS
Un Réseau Hydraulique et ses Aqueducs du Moyen Âge et du XVIIIe Siècle
SONDAGE DE LA CANALISATION DE DISTRIBUTION
Un Sondage de Nécessité
Découverte lors de notre sondage de l’année 2000, il était convenu d’explorer cette canalisation jusqu’à sa sortie dans la prairie. Nous avions repéré celle-ci en fermant la vanne située en aval du raccord de tuyau dans l’aqueduc à l’aide d’une pelle. Le niveau de l’eau s’était élevé et engouffré dans la tuyauterie. Au bout de quelques instants, nous pouvions observer qu'un bouillonnement et une flaque d’eau s’étaient formés dans le pré. Après avoir creusé le sol sur environ 10 cm de profondeur, nous dégagions la sortie. Un tuyau vertical remontait vers la surface. Il nous restait à procéder au quadrillage du site pour tenter d’élucider cette énigme.
ORGANISATION DU SONDAGE DE LA CANALISATION DE DISTRIBUTION
Réalisation du Sondage Archéologique
La canalisation de distribution fut découverte dans la cadre C du sondage effectué durant l’année 2000. Elle est orientée au sud et mesure 14,50m de longueur. Elle est presque située au milieu de l’aqueduc collecteur. Elle est constituée de plusieurs segments de tuyau en fonte raccordés entre eux par un scellement en ciment d’époque moderne.
Chaque section mesure environ 2m de long. Le raccord présente une bouche mâle et femelle avec un pas de vis. En plus du vissage, la gangue de ciment joue le rôle de joint. Elle suit une pente faible et elle est enterrée à faible profondeur dans le sol. A son origine, elle est à 10cm de profondeur puis elle s’enfonce peu à peu pour atteindre 20cm à sa sortie dans la prairie. Au XVIIe/XVIIIe siècle, elle devait être en plomb, comme nous l’ont laissé suggérer les fragments de plomb que nous avons retrouvé lors du premier sondage. Son remplacement par une tuyauterie en fonte remonte tout au plus à la fin du du XIXe, début XXe siècle.
Quadrillage de la Surface de l'Extension de la Canalisation de Distribution
La canalisation servit d’axe symétrique, sur les 14 mètres de longueur constituant l’emprise du sondage. Sur les 10 premiers mètres, des carrés d’un mètre de chaque côté du tuyau furent matérialisés, constituant le cadre F et numérotés de 1 à 20.
Au point de sortie de la canalisation dans la prairie, fut créé le cadre G. Il comportait 16 carrés numérotés de 21 à 36. La surface du sondage représentait 36 m², soit 20 m² pour F et 16 m² pour G.
Compte tenu que l’objet de nos recherches était de retrouver un bassin ancien enfoui sous la terre, nous avons pris une contrainte de 2 m de part et d’autre du point de sortie du tuyau dans le pré.
Ce sondage avait pour but de vérifier la continuité de la canalisation, de retrouver d’éventuels piquages en épi et de trouver un réceptacle pour les eaux détournés du cours de l’aqueduc. Le sondage commença simultanément à chaque extrémité du quadrillage. A l’origine, l’opération archéologique de l’année 2001 aurait dû commencer à cet endroit, si la pluie n’avait pas contrecarré les projets. Néanmoins, elle servit les recherches si l’on considère le résultat des travaux précédents.
Décapage du Cadre G
Il commença le mardi 12 juin. Trois carrés choisis intentionnellement devaient nous éclairer sur ce sondage. Les carrés 30, 36 et 33 furent décapés.
Le carré G30, après avoir été creusé jusqu’à 1 m de profondeur, n’apporta aucun élément nouveau. Le mobilier était de plus inexistant.
G36, vidé de son contenu pour une profondeur équivalente, ne nous appris guère plus.
Après avoir entamé la même procédure sur G33, nous arrivions à la même conclusion. Il n’existait, semble-t-il, aucun bassin enseveli dans le cadre G.
En fin de journée, alors que nous échangions nos idées, un amas de pierres situé le long de la clôture du champ près du chemin attira notre attention. Après l’avoir dégagé des orties et des ronces qui l’envahissaient, nous avons examiné chacune d’entre elles. Certaines étaient les éléments de côtés ou d’angles d’un réceptacle mais cela pouvait être une auge où les bêtes venaient boire. Mais l’une d’entre elles était percée d’un trou, et bien que brisée, elle conservait l’empreinte dans le ciment, du tuyau de sortie de la canalisation. Le joint parfaitement apparent était celui par lequel il pénétrait dans le bassin en pierre.
Compte tenu du poids et de la grosseur des pierres, il devait contenir une grande quantité d’eau. lorsque les dimensions furent prises et comparées entre le tuyau et cette empreinte, nous avions la preuve que ce que nous recherchions n’était pas enseveli dans le sol mais en surface, car les diamètres concordaient parfaitement.
Au regard de cette trouvaille, la poursuite du sondage du cadre G fut définitivement interrompue.
Décapage du Cadre F
Entamé en même temps que le cadre G, il confirma rapidement les espoirs que nous mettions en lui. Quatre carrés, 10, 11, 9 et 12, furent fouillés. Comme pour l’année précédente, nous retrouvâmes rapidement la présence gallo-romaine. Céramique, tegulae et enduit rose étaient mélangés à la terre. La poursuite de la fouille amena ensuite son lot de découvertes dans ces quatre carrés. Les 16 carrés suivants, bien que renfermant des éléments de mobiliers épars, ne révélèrent pas autant de trésors. Ils confirmèrent cependant grâce à ces vestiges qu’un ou plusieurs monuments d’assez grandes dimensions reposaient à une certaine profondeur.
NOUVELLES DECOUVERTES ARCHITECTURALES MAJEURES
Epoque Médiévale
L'Aqueduc Médiéval (AO)
C’est le 7 juin qu’apparut le premier élément important. Le montant lisse et plane d’un bloc de pierres aux dimensions imposantes fut mis à jour dans le carré 11 du cadre F. Après plusieurs journées de travail, ce bloc occupait également une partie du carré 12. Il reposait principalement dans cet espace. Dégagé à 20cm de la surface du sol, son piédroit gauche mesurait 0,62m de hauteur. Sa base de 0,78m était posé parfaitement de niveau sur un lit de pierres mélangées à de la terre, avec incorporation de fragments de tegulae. Cet élément appartenait à un aqueduc remontant au premier temps du Moyen âge. Il se dirigeait vers le coteau selon un axe ouest / est. Il fut appelé Aqueduc d’Origine.
Un Habitat Médiéval
Un Sol d'Habitat Médiéval
Découvert dans le carré 11, au même niveau que la base de l’aqueduc d’origine, ce sol formait une banquette comme indiquée en 2a et 2b de notre dessin. Il était constitué de dalles de pierres de formes et de grosseurs inégales. Son assise était à peu près plane. Les pierres étaient scellées entre elles au moyen d’une terre argileuse plus dure que celle du comblement de la fosse. Elle dessinait sur le sol une sorte d’équerre dans la profondeur de laquelle venait s’encastrer un mur gallo-romain.
Un Mur Médiéval
Il était implanté près du piédroit sud de l’Aqueduc d’Origine, contre lequel il venait buter. Il terminait sa course dans le carré O1 du cadre O. Il était construit à l’aide de blocs plus ou moins gros. Ils ont pratiquement tous été équarris. La face exposée côté intérieur de la fosse monumentale, présente un mur uniformément plat et de belle composition. Tous les joints sont bouchés avec une terre friable. Une fois mise à jour, la structure générale présentait des signes de faiblesse, malgré une bonne homogénéité car il ne reposait sur aucune fondation solide. Il était posé directement sur un sol de terre grise argileuse. Son épaisseur est à peu près semblable sur la longueur. Elle se situe entre 40 et 50cm. Il mesure 2 mètres de long et 0,60m de hauteur. La Canalisation de Distribution le traverse dans sa course au milieu de la prairie. Ce mur se poursuit en direction du chemin qui passe entre le lavoir et le site. Nous en avons retrouvé la trace quelques mètres plus loin? lors du creusement de la coupe en profil T6.
Période Antique
Un Habitat Gallo-Romain
Des Murs Gallo-Romains
Ils sont au nombre de deux et reposent sur le sol géologique de la fosse monumentale. Ces fondations sont imbriquées l’une dans l’autre et chacune est orientée sur un point cardinal. Elles sont constituées d’un mélange de pierres plus ou moins grosses, mais quelques-unes sont énormes. Elles servent de boutisses et de demi-boutisses et assuraient une bonne assise aux murs qui s’élevaient au-dessus. Les joints sont réalisés avec de la terre argileuse jouant un rôle d’étanchéité important. Ils bloquaient ainsi solidement les blocs entre eux. Quelques fragments de tegulae étaient mélangés à la terre.
Le mur nord/sud est le plus long. Il mesure 1,90m de long, 40cm de large et 45cm de haut. Il passe sous le mur médiéval. Le mur est/ouest prend son origine dans le corps du mur nord/sud. Ses dimensions, bien qu’il nous soit apparu sur une faible longueur respectent la normalité du précédent.
Stratigraphie de la Fosse Monumentale ouverte dans le Cadre F
La Fosse Monumentale ouverte en F, représente une surface de 6m². Le sol géologique fut atteint à 1,60 m de profondeur. La stratigraphie fut réalisée au point A situé au sud/est de la fosse à l’aplomb du mur médiéval et de l’aqueduc d’origine, points les plus intéressants du sondage. Ce point correspond au carré 12 du cadre F.
Le relevé stratigraphique se décompose ainsi :
Sol à -0,60m - Terre, pierres du mur médiéval.
-0,60 à -1m - Terre argileuse grise mélangée à un petit cailloutis.
-1 à -1,20m - Terre argileuse grise devenant sablonneuse.
-1,20 à -1,35m - Terre argileuse grise et sablonneuse mélangée à du cailloutis.
-1,35 à -1,60m - Terre sablonneuse et petits escargots (limnées). Calcaire gris, marneux.
Nature et Implantation du Mobilier dans l'Etude Stratigraphique
Quelques éléments de mobilier furent retrouvés dans les différents étages stratigraphiques.
Entre -1 et -1,25m - Un fragment de bordure appartenant à une poterie noire médiévale.
- Un granulat rouge gallo-romain en faible quantité et assez épars, correspondant à de la tegulae concassée.
Entre -1,25 et -1,45m - Quelques fragments d’os animalier.
Entre -1,45 et -1,60m - Un fragment d’os à -1,60 m et des petits morceaux de charbon de bois.
Parmi les 6 carrés inclus dans la fosse, c’est dans les carrés F10, F11 et F12 que la présence romaine se rencontre le plus. Elle semble s’estomper à l’aplomb du mur médiéval. Néanmoins, un bel élément de tegulae fut retrouvé en F8 à 0,25m de profondeur et à 0,60m de l’extrémité ouest du mur médiéval. Il était encastré dans la terre et la pierraille en limite de notre quadrillage. Il fut laissé en place.
Le sol géologique a été trouvé à 1,60m de profondeur alors que lors de notre stratigraphie effectuée durant l’été 2000 dans le carré 5 du cadre A, il se trouvait à 1,95 m. Sa composition en tuf jaunâtre était différente de celle rencontrée au point A du carré F12.
Il est à noter qu’un autre élément important nous a été révélé dans cette stratigraphie. Nous avions remarqué, le remplissage du fond de la vallée par l’éclatement des digues. Ce remplissage que nous retrouvons dans la fosse monumentale s’arrête brusquement contre le mur médiéval. Nous ne l’avons plus rencontré durant le sondage des carrés F8 et F13. Cet indice est important, car il nous permet de dire que l’Aqueduc Collecteur a été construit après cet incident sur les ruines, alors que l’Aqueduc d’Origine et le mur médiéval l’ont été bien avant cette catastrophe. Ce qui explique que l’aqueduc se situe à un niveau plus bas que celui datant du XVIIe/XVIIIe siècle et qu’il fut incorporé plus tard dans le mur médiéval comme en témoignent le calage et son écoulement.
Cette collecte confirme également la forte présence gallo-romaine mise en évidence au cours de notre sondage effectué au cours de l’année 2000. La stratigraphie prouve irréfutablement la thèse de l’existence d’une construction gallo-romaine, hypothèse que nous avions émise dans notre rapport de sondage écrit en 2000.
Conclusion
La découverte de ces quatre monuments montre l’intérêt archéologique de la vallée des Laquais. Bien que soupçonné dès l’année 2000, nous pensions prouver l’occupation gallo-romaine du site, mais le résultat des recherches a dépassé nos espérances car nous étions loin de nous douter de son importance. A partir d’un élément que nous dirons secondaire, qui est la présence de cette canalisation de distribution, nous avons non seulement compris l’utilisation de celle-ci, mais la fouille nous a permis de soulever le voile qui masquait les monuments enfouis dans le sol de la prairie.
Nous avons d’une part retrouvé les preuves de cette occupation gallo-romaine, et d’autre part nous avons montré qu’une occupation humaine s’était perpétuée tout au long des siècles. Cette occupation est confirmée par les découvertes de nouveaux monuments appartenant à des époques différentes.
SONDAGE COMPLEMENTAIRE DE L'AQUEDUC D'ORIGINE (AO)
Description et Implantation de l'Aqueduc d'Origine (AO)
C’est le hasard qui nous fit découvrir cet élément d’aqueduc dont nous ne supposions pas l’existence. Aucun signe en surface, ni aucun indice n’existaient. L’opération réalisée en 2000 n’avait révélé aucune présence nous laissant penser qu’un autre aqueduc avait été construit ici. Il a fallu pratiquer le sondage de la canalisation de distribution pour mettre à jour ce nouveau monument
C’est un bloc calcaire creusé en U. Il présente des piédroits aux faces parfaitement planes qui ont été sciés proprement. Les parois internes ont été également sciées et soigneusement évidées. Le fond du lit forme une cuvette propre qui a dû subir l’action d’un polissage afin de ne laisser aucune aspérité gênant l’écoulement de l’eau. De longues et profondes rainures strient les bases de chaque côté. Ces cicatrices tracées dans la pierre servaient à réaliser un jointage solide et étanche. L’ajustage devait être parfait et ce travail de précision devait être exécuté par un tailleur de pierre expérimenté. Peut-être était-ce un compagnon, car le bloc présente une taille nette et précise et le rainurage est d’une grande perfection.
Le monument dans lequel il s’incorporait, était construit dans un plan latéral à l’Aqueduc Collecteur du XVIIe/XVIIIe siècle, élevé bien des siècles plus tard. Ce bloc était posé en limite des carrés F11 et F12 dans lequel il débordait largement. Le piédroit gauche orienté vers le nord était sur l’axe F11 / F12 et F10 / F9. Il était placé à 0,60m de la canalisation de distribution et à l’est de celle-ci. Il reposait à une faible profondeur car le sommet du piédroit gauche ne se trouvait qu’à 20cm de la surface. Lorsqu’il fut déterré, nous pensions être en présence de blocs débités sur place comme nous en avions retrouvés en divers endroits, lors du sondage 2000. Une fois dégagé, c’était un monolithe taillé d’un seul tenant.
Cette découverte bouleversa l’orientation de la fouille, car nous avions mis à jour en même temps, le sol et le mur médiéval.
Un nouveau quadrillage du site fut mis en place avec la création d’un cadre O comme Origine. Cinq carrés, numérotés de O1 à O5 s’inscrivirent dans le paysage. Le dernier, le numéro 6, ne fut pas fermé car il devait servir à la réalisation d’une coupe en profil pour vérifier une hypothèse élaborée l’année précédente. Chaque carré mesurait 1,50m de côté. Le tracé du quadrillage épousait l’orientation donnée par l’axe de mise en place de l’élément. C’est pour cette raison que, sur notre schéma général, les carrés O4 et O5 mordent les carrés E65, E78 et E77 du cadre E, du sondage de l’Aqueduc Collecteur.
Le sondage devait vérifier s’il existait un nouvel aqueduc en place, en prolongement de cet élément ou si plusieurs blocs avaient été laissés sur place, car nous étions surpris de ne pas en avoir rencontré d’autres en F10 ou F9.
Un nouvel aqueduc orienté en direction du coteau nous semblait probable. Son ancienneté plus avancée par rapport à l’Aqueduc Collecteur ne faisait aucun doute.
Construction de l'Aqueduc d'Origine (AO)
Choix de la Prise d'Eau et de la construction de l'Ouvrage
Pour quels motifs l’installation de cet aqueduc fut-elle établie en cet endroit ? Il semblerait qu’au cours des âges il y eut plusieurs points de captage. Nous connaissons depuis l’étude réalisée en 2000 celui de l'Aqueduc Collecteur.
Le puits d’accès ou d’aération décrit dans notre premier rapport, reçoit l’eau d’une faille géologique. Le sondage de l’année 2001 a révélé l’existence d’un autre point d’eau.
La prospection du site nous a appris également qu’un puits désaffecté existait près du lavoir des Laquais. Bien que celui-ci n’ait pas encore fait l’objet d’un sondage, il sera peut-être nécessaire de l’effectuer au cours d’une prochaine campagne. En effet, ce point d’eau pourrait être le départ du premier Aqueduc d’Origine. Il existe une étrange coïncidence entre lui, la source retrouvée dans la prairie et l’Aqueduc d’Origine. Ces trois points sont alignés sur un même axe. Il semblerait qu’à trois époques éloignées les unes des autres, on ait capté ou puisé l’eau en trois endroits différents :
- 1re époque : Age de Bronze Source de la prairie désaffectée.
- 2me époque : Moyen âge Emplacement du puits désaffecté.
- 3me époque : XVIIe siècle Puits en service près du lavoir.
Quels événements auraient modifiés l’émergence de ces sources ?
Dans le premier cas, on peut supposer un phénomène naturel, sécheresse, glissement de terrain ou tremblement de terre. Ces incidents auraient entraînés le déplacement du point de captage.
Puis la destruction des digues et le remplissage de la vallée par les matériaux auraient détruit l’Aqueduc d’Origine et tari la source.
Enfin, au XVIIe/XVIIIe siècle, un nouveau captage, qui s’avère le dernier, est réalisé avec la construction des ouvrages que nous connaissons.
L’Aqueduc d’Origine aurait été construit depuis le lieu où se positionne ce puits et aujourd’hui en partie comblé. Ce puits, selon nos premières observations, ressemble à celui retrouvé par Sébastien DAULON, dans la digue situé en contrebas du barrage des Theils. Si cela se confirmait, nous aurions la preuve que les barrages des Theils, celui des Laquais ainsi que les digues pourrait être contemporains du puits désaffecté et de l’Aqueduc d’Origine. En trouvant le fond du puits, nous saurons s’il existe une canalisation qui y prend son origine et nous pourrons procéder à de nouveaux relevés de nivellement qui nous renseigneront davantage.
Ces hypothèses nous permettent d’émettre des suppositions sur les choix et les motifs qui ont influencé les hommes à construire plusieurs monuments, plutôt que de réutiliser ceux d’origine.
Si l’on étudie le schéma général, on constate que l’Aqueduc Collecteur n’a pas été construit sur un plan parallèle. Si l’on considère l’axe donné, d’ouest en est, par l’Aqueduc d’Origine, les deux monuments forment un V. Le niveau de l’Aqueduc d’Origine est plus bas que l’Aqueduc Collecteur.
Vers quel type de monument se dirigeait AO ? Ou quel bâtiment alimentait en eau cet aqueduc remontant aux premiers temps du Moyen âge ? Nous n’avons pas de réponse à ces deux questions bien que nous ayons dégagé à proximité une section de mur médiéval plus tardive.
Incorporation de l’aqueduc au mur médiéval et raisons de sa conservation. Plusieurs indices nous renseignent sur cette incorporation dans un mur appartenant à un autre monument et d’une époque plus récente :
- premièrement : l’aqueduc fonctionnait-il toujours, lors de cette construction sur la totalité de son parcours ;
-deuxièmement : au fur et à mesure que cette fondation s’élevait, on l'incorpora entre ce bloc et le mur des pierres de calage ;
-troisièmement : brisa t-on le piédroit côté sud, pour recevoir les eaux de cet habitat ou de tout autre établissement ou permettre leur puisage au passage.
Tous ces aménagements furent mis en place intentionnellement. Le montant fut cassé pour une meilleure utilité, le blocage assurait une solidité plus grande à ce mur et l’écoulement pratiqué dans l’épaisseur de ce mur rejetait les eaux propres prélevées ou les eaux usées dans le conduit. Ces transformations n’ont pu être exigées que pour la construction récente que l’on a édifiée à proximité. Si celle-ci était contemporaine les constructeurs auraient aménagé différemment ce problème d’alimentation en eau avec des canalisations en terre cuite ou en plomb et la construction aurait bénéficié d’une architecture plus sophistiquée. Il n’aurait pas été nécessaire alors, d’amputer le bloc d’une de ses parois.
En outre, cette transformation n’a pu intervenir qu’après, sinon pour quelles raisons valables son constructeur aurait brisé ce piédroit en risquant de voir les eaux inondées les alentours. Cela n’aurait pas eu de sens et aurait empêcher le bon fonctionnement de son ouvrage.
Stratigraphie reconnue sous l’élément d’aqueduc
Nous ne possédons malheureusement qu’un seul exemplaire des éléments constituant le monument. Une certitude cependant existe : c’est qu’il a toujours occupé l’emplacement où il se trouve. Le radier sur lequel il repose n’a subi aucun dommage. Celui-ci consiste en un calage de grosses pierres mélangées à de la terre brune de 40cm d’épaisseur.
Une couche de pierrailles et de terre argileuse grisâtre de 30cm occupe un étage intermédiaire. Cette partie comportait quelques incrustations de tegulae concassées. Le dernier étage de notre stratigraphie se composait de terre sablonneuse grise assez fine. Une multitude de limnées, escargots de rivière, étaient mélangés à cette terre fine. Cette couche de 0,70m entrecoupée d’un mince lit de pierrailles descendait jusqu’au sol géologique. Toute cette stratigraphie était homogène et n’avait pas été remaniée. A quelques détails près, elle ressemble à la stratigraphie du mur médiéval telle que nous l’avons décrite en A sur notre dessin.
Destruction de l'Aqueduc Origine (AO)
Si l’aqueduc d’origine n’avait pas été détruit, il mesurerait environ 20 mètres de longueur, jusqu'au chemin. Sachant qu’un bloc possède une largeur de 0,33 m, il aurait nécessité la fabrication de 60 éléments jusqu’à cette limite.
Si aujourd’hui il ne nous reste que cet unique élément, nous avons la certitude que plusieurs blocs furent utilisés dans la construction de l’Aqueduc Collecteur. La comparaison entre les dimensions des pierres de l’un avec celles de l’autre montre que les piédroits et les dalles du lit furent taillées dans le débitage des blocs de l’Aqueduc d’Origine. Nous avons donc tenté de chercher combien d'éléments de AO avaient été incorporé dans AC.
Au premier abord, elles sont peu nombreuses mais si l’on y regarde à deux fois, on s’aperçoit qu’un nombre supérieur a pu en provenir. Cette incorporation s’est effectuée en plusieurs points de AC. Nous avons recensé deux pierres de la paroi sud du cadre B et du cadre C. L’une est en B, dans le carré 20, l’autre est en C, dans le carré 26. Elles sont côte à côte. Elles mesurent 0,40m et 0,41m de longueur. Leurs dimensions concordent avec celles de l’élément de AO.
Deux autres pierres sont placées dans le cadre D. La première est le piédroit sud du carré 62, la seconde est le piédroit nord du carré 50. Elles font la même longueur, 0,57m.
Les trois dernières se trouvent au nord, dans les carrés 67, 80 et 75 du cadre E. La pierre du carré n°67 porte la feuillure rainurée horizontale. Elle mesure 0,59m. La dalle du carré n°80 atteint les 0,60m. La plus longue est la pierre du carré n°75. Elle fait 0,79m de long. C’est celle de l’extrémité de l’aqueduc collecteur. Elle est marquée d’une feuillure. Ce sont les pierres qui correspondent aux dimensions relevées sur le bloc de AO avec ou sans retouches.
Maintenant, en considérant que certaines d’entre elles aient pu subir un travail de taille dans l’épaisseur ou la largeur, un nombre supplémentaire entre dans la construction de AC.
Dalles du lit :
- 2 dans les carrés 5 et 12 du cadre A,
- 2 dans le carré 38 du cadre C,
- 6 dans les carrés 57, 64 et 50 du cadre D,
- 4 dans les carrés 67, 80 et 75 du cadre E.
Cette énumération nous indique que sept pierres servent de piédroits et quatorze autres sont couchées dans le lit de AC, soit 21 pierres provenant de l'Aqueduc Origine (AO) qui furent sciées ou retaillées pour être incorporées dans l’Aqueduc Collecteur (AC).
La base du bloc original pouvait donner des pierres de 0,78m de long ou de 0,43m qui pouvait servir de parois verticales à AC. Les piédroits fournissaient des pierres de 0,62m de long sur 0,33m de large et avaient la même utilité selon le débitage intervenant sur la base. Si celle-ci était conservée, les piédroits livraient des pierres de 0,46m de long pour 0,33m de haut, pouvant entrer dans la construction de l’aqueduc collecteur.
Le débitage ou retaillage des pierres se pratiqua sur place car de nombreux morceaux de pierres de taille calcaire furent trouvés durant l’opération 2000, près de l’Aqueduc Collecteur. Seuls quelques fragments furent aperçus dans le cadre O, lors du sondage 2001.
Nous pouvons affirmer que sept pierres de l’Aqueduc Collecteur appartenaient à des blocs de l’aqueduc d’origine. Mais nous soupçonnons un grand nombre d’entre elles d’être les vestiges de celui-ci, car nous ne pouvons vérifier le lit de l’Aqueduc Collecteur qui en possède vraisemblablement.
Néanmoins, un lot important a disparu et a dû servir à la construction des maisons du bourg. Les carrières naturelles que représentaient les aqueducs de Mornac étaient une manne providentielle pour les carriers ou les habitants. Cette pratique a toujours existé et de nombreux monuments ont été détruits pour la récupération de la pierre qu’ils offraient en grande quantité.
Nature et Répartition du Mobilier de la Fosse Monumentale (AO)
Contrairement à ce que nous aurions pu espérer, le mobilier retrouvé dans l’aire de la fosse monumentale fut pauvre. Il se résumait à quelques fragments de tegulae, de la céramique commune, de la poterie médiévale et des silex.
Compte tenu des vestiges reposant sur le sol géologique, nous pensions qu’il aurait été plus important. Néanmoins, il confirme notre hypothèse du sondage 2000. Ce mobilier principalement gallo-romain se rapportait bien à un monument enseveli.
Le mobilier protohistorique qui fut ramassé durant les deux campagnes archéologiques 2000 et 2001 montra l’importance du site dès les époques les plus reculées. La découverte d’un point d’eau fréquenté par les hommes durant cette époque et d’un outillage divers apporta les réponses aux questions posées lors du premier sondage. Les hommes de la Préhistoire habitaient Mornac et venaient puiser de l’eau à l’une des sources du Rouissoir. Une description minutieuse de ce mobilier a été réalisée par Bernard FABRE au chapitre « Etude et Répartition du Mobilier recueilli lors de l’opération archéologique 2001 ».
Datation du Monument
Bien que de nombreux mystères aient été levés au cours de cette campagne, il demeure encore des énigmes à résoudre.
Sa construction établie au-dessus de fondations gallo-romaines nous permettent de le situer dans le temps. Nous avions indiqué dans notre rapport de l’année 2000 que le côté sud de l’Aqueduc Collecteur avait été très perturbé. Nous savons aujourd’hui quelle fut la raison de ce bouleversement : le réemploi des éléments de l’Aqueduc d’Origine. Malgré cette perturbation, nous avions retrouvé un tesson appartenant à l’époque carolingienne. De plus l’histoire locale rapporte la venue de Charlemagne à Mornac. Cela laisse supposer un lieu capable d’offrir au grand roi tout le confort de l’époque avec ses bains. Mornac offrait peut-être un lieu de campement idéal pour ses troupes ?
Bien que de nombreux mystères aient été levés au cours de cette campagne, il demeure encore des énigmes à résoudre.
En supposant qu’il exista un tel établissement à Mornac, nous pouvons émettre avec prudence que les vestiges gallo-romains retrouvés aux Laquais auraient pu être l’un de ces sites et qu’il pouvait recevoir la visite d’un tel hôte.Mais Charlemagne est-il vraiment venu à Mornac? N'est-ce pas une nouvelle légende carolingienne?
La destruction du site serait intervenue plus tard. Ce n’est qu’après celle-ci qu’aurait été envisagée la construction de l’Aqueduc d’Origine.
Si l’on prend en considération une période d’abandon et de troubles, longue de plusieurs siècles, on peut imaginer un réveil du site après l’an mil. Sous la volonté d’une action féodale ou religieuse, peut-être l’idée de construire un aqueduc avec les vestiges et sur les ruines de cet antique établissement gallo-romain a-t-elle été programmée. C’est une hypothèse que nous pouvons juste émettre. Nous ne pouvons pas affirmer aujourd’hui que ce monument date du XIIe plutôt que du XIVe siècle, il nous manque beaucoup trop d’éléments de réponse. Nous pouvons seulement affirmer qu’il est très antérieur à l’aqueduc collecteur du XVIIe/XVIIIe siècle.
Sans la découverte de l’élément d’Aqueduc d’Origine, l’opération archéologique de l’année 2001 n’aurait pas été aussi riche en rebondissements. Non seulement sa mise à jour a réorienté les recherches mais il nous a permis d’établir une chronologie plus précise sur l’occupation de la vallée au cours des âges.
Ce sondage nous a permis également d’établir qui reliaient les monuments entre eux, possibilité que nous n’avions pu exploiter auparavant. Il nous renseigne également sur un autre aspect de cette présence humaine sur le site. Il nous a éclairé sur les bouleversements qui ont agité les lieux et contribué à une meilleure compréhension du site.
En conclusion, le sondage effectué près de la Canalisation de Distribution qui devait être une simple exploration sans grande envergure, est devenu le moment fort de l’opération exécutée en 2001. La révélation des vestiges qui dormaient au sein de la fosse monumentale montre l’importance des monuments qui existaient dans la vallée et le rôle joué par les hommes durant plusieurs millénaires.
LES COUPES EN PROFIL T1 A T5
Exécution de ces Différentes Opérations
Plusieurs raisons motivèrent ces actions. L’une fut la recherche d’un conduit souterrain enterré sous le sol de la prairie entre les Aqueducs Collecteur et Primaire. La seconde consistait à découvrir une éventuelle relation entre le haut de la vallée et le bassin du Rouissoir. Il fallait obtenir l’assurance qu'aucun aqueduc, qui serait descendu du barrage des Laquais aurait amené ses eaux dans l’Aqueduc primaire. La dernière raison, consistait à savoir si ces trois monuments fonctionnaient séparément ou avait un lien entre eux.
C’est ainsi que nous avons décidé de réaliser cinq coupes en profil dénommés T1 à T5 entre les deux monuments : T1 à T4, soit quatre tranchées, pour rechercher les éléments enfouis d’une quelconque relations entre les trois monuments ; T5 pour découvrir les vestiges d’un aqueduc en provenance du barrage des Laquais et qui se serait poursuivi vers l’aqueduc primaire.
Exécution de l’opération
Pour effectuer cette opération, la commune de Mornac libéra les moyens en personnel et en matériel qui nous étaient indispensables durant deux journées. Elle mit à notre disposition une pelle mécanique manœuvrée par un employé communal, M. Jean-Christophe MIEN, qui réalisa les cinq tranchées souhaitées.
Les coupes en profil seront réalisées en moyenne tous les 10 mètres, entre T1 et T4. Les distances séparant les points T1, T2 et T3, seront prises à partir d’un point X, correspondant au départ de l’Aqueduc Primaire. Celles des points T4 et T5 seront relevées à partir de l’extrémité est, de l’Aqueduc Collecteur, appelée Point Y. Les coupes en profil étant perpendiculaire à l’axe AC/AP, le métrage retenu sera celui d’un axe médian moyen.
T1 : Distance avec X = 12,50m
T2 : Distance avec X = 21,00m
Distance entre T1 et T2 = 9,50m
T3 : Distance avec X = 29,50m
Distance entre T2 et T3 = 8,50m
T4 : Distance avec Y = 5,50m
Distance entre T3 et T4 = 9,0 m
T5 : Distance avec Y = 6,00m
La coupe en profil T4 tranchait le cours du Rouissoir et l’axe des aqueducs AC et AO. La coupe T5, située à l’est de AC, s’enfonçait dans le coteau et coupait l’axe du Barrage des Laquais, vers AP.
Stratigraphie des Coupes TI à T3
Seule l’épaisseur des couches change selon l’endroit.
Coupe et stratigraphie de T1
Orientation : Elle est orientée selon un axe SO-NE.
Dimensions : Elle mesure 3,60m de long. Sa largeur évolue entre 0,4m, largeur de la pelle et 0,70m, à l’extrémité NE. Sa profondeur s’échelonnait entre 0,60m et 1,15m.
Stratigraphie
0 à -0,30m - Terre végétale.
-0,30 à -0,80m - Mélange de terre et de pierrailles.
-0,80 à -1m - Terre et marne (tuf jaunâtre).
-1 à -1,15m - Sol géologique, calcaire dur jaunâtre.
Découvertes
Un fragment de calcaire de même nature que les blocs appartenant à AO fut dégagé lors de l’étude de cette coupe. Dimensions : Longueur : 19cm ; Largeur : 11cm ; Epaisseur : 7cm.
C’est entre les coupes T1 et T2 que fut ramassée à faible profondeur, la bêche décrite précédemment. Celle-ci était placée à mi-distance des deux coupes près du coteau.
Coupe et stratigraphie de T2
Orientation : C’est une orientation identique à T1, SO-NE.
Dimensions : Cette coupe fut réalisée à la pelle mécanique et terminée à la truelle car elle présentait un certain intérêt. Sa longueur était de 5,30m, sa largeur faisait 0,40m en s’élargissant jusqu’à 0,60m. Sa profondeur évoluait sur une échelle de -0,50à -1,10m.
Stratigraphie
0 à -0,30m - Terre végétale,
-0,30 à -0,45m - Terre et pierrailles.
-0,45 à -0,80m - Terre mélangée à de la marne.
-0,80 à -1,10m - Sol géologique, calcaire dur jaunâtre.
Découvertes
Sept tessons de céramiques, moyenâgeuse et moderne, furent ramassés dans cet espace. Ils ne possédaient aucun décor. Ils appartiennent à plusieurs poteries.
Deux sont des pâtes grises ; trois appartiennent à des poteries à pâte grise et rose orangée et semblent datées du XVIe siècle. Le dernier est trop petit pour émettre un avis. Tous ces fragments proviennent de panses de poteries brisées.
Coupe et stratigraphie de T3
Orientation : Son orientation est la même que celles de T1 et T2.
Dimensions : La coupe mesure 4m de longueur. Sa largeur est régulière et mesure 0,40m. La profondeur ne dépassait pas 1m.
Stratigraphie
0 à -0,20m - Terre et pierrailles.
-0,20 à -0,50m - Pierrailles et tuf marneux.
-0,50 à -0,80m - Marne, terre et cailloutis.
-0,80 à -1m - Sol géologique, tuf de mauvaise qualité.
Découverte
Il fut découvert deux tessons de céramique moyenâgeuse sans intérêt.
Stratigraphie Particulière à T4 et T5
Coupe et stratigraphie de T4
Orientation : Elle est identique à celles des autres coupes en profil.
Dimensions : Elles correspondent à celles de T3, seule la profondeur est plus importante car elle atteint 1,40m.
Stratigraphie
Elle diffère des autres coupes et le sol géologique ne fut pas atteint.
0 à -0,60m - Mélange de terre et de pierres.
- Découvertes de plusieurs dalles ayant appartenu à l’aqueduc aérien de même nature que les dalles de couverture de AC.
-0,60 à -1,40m - Terre marron rouge avec mélange de pierrailles jusqu’au fond de la tranchée.
- Arrêt du creusement à cette profondeur, celle-ci étant bien en dessous du niveau de AC et AO.
Découverte
Seul un fragment de tegulae fut ramassée dans la tranchée.
Coupe et stratigraphie de T5
Orientation : Cette coupe en profil est désaxée par rapport au profil suivi par l’aqueduc aérien. Elle est creusée en prolongement de AC, à l’est dans le coteau. Elle présente un schéma en accent circonflexe avec une orientation E-NE. Le but de sa réalisation était de vérifier s’il existait une jonction entre AC et AP et de prouver l’existence d’un nouvel aqueduc arrivant du Barrage des Laquais.
Dimensions
C’est la coupe la plus importante de l’ensemble. Longue de 5,90m, sa largeur est également la plus grande, soit 0,80m. En profondeur, elle atteint 1,20m.
Stratigraphie
0 à -0,40m - Pierres et terre rouge argileuse.
-0,40 à -0,60m - Mélange de terre et de pierrailles.
-0,60 à -0,90m - Terre et cailloutis blancs.
-0,90 à -1,20m - Cailloutis et terre sablonneuse jaunâtre.
-1,20 à -1,40m -Tuf, sol géologique
Découvertes
Nous avons découvert quelques fragments de tegulae, de la céramique gallo-romaine et un élément de pierre correspondant à la nature des blocs de AO.
Les recherches particulières à T4 et T5 se sont avérées négatives. A aucun moment il n’a existé une relation technique entre les trois monuments. Il n’y a jamais eu de point de jonction et les coupes réalisées en profondeur ont démenti l’existence d’un possible aqueduc souterrain. De même, il ne pouvait, compte tenu de ces vérifications, y avoir un point de raccordement entre AC et AP.
T5 ou la Fin d’une Hypothèse
La coupe en profil réalisée en T5 visait à prouver la présence d’un aqueduc arrivant depuis le Barrage des Laquais, dont AP aurait été le prolongement. Cette opération fut négative car nous n’avons retrouvé aucun indice, ni aucune trace d’un éventuel conduit. Il était nécessaire de vérifier celle-ci car il aurait toujours subsisté un doute sur la construction du monument.
Cette tranchée nous a permis également de rejeter la matérialisation d’un point de raccordement entre cet aqueduc présumé et AC. Ainsi l’hypothèse de l’existence d’une liaison entres le haut de la vallée et son bassin est-elle définitivement abandonnée.
Il fut découvert deux tessons de céramique moyenâgeuse sans intérêt.
LA COUPE EN PROFIL EN PROFIL T6
Conditions d'Exécution de cette Opération Extérieure au Site
L’absence de vestiges entre AO et le reste de la fosse monumentale nous a imposé de procéder à une vérification complémentaire. Nous avons décidé d’exécuter cette procédure en faisant d’une pierre deux coups.
En effet, nous avions remarqué durant l’automne et l’hiver 2000 et 2001, périodes de fortes précipitations, que la prairie proche de l’aqueduc collecteur était inondée. Renseignés par les commentaires et les observations du propriétaire, M. RICHARD, nous avions repéré le point de résurgence où l’eau bouillonnait, dans l’attente d’en percer un jour l’énigme.
Cette résurgence surgit des profondeurs à quelques mètres au sud de AC et dans le prolongement de AO. La fosse monumentale étant toute proche, nous avions envisagé de faire la tranchée de T6 jusqu’à un niveau équivalent au cas où d’autres vestiges de fondations apparaîtraient, en complément de blocs d’aqueducs provenant de AO.
Conditions d'Exécution de cette Opération Extérieure au Site
Il fut découvert deux tessons de céramique moyenâgeuse sans intérêt.
Stratigraphie de T6
M. Rémi SARDIN, Responsable de l'Equipe Technique de Moranc, exécuta lui-même cette opération. Il perça cette tranchée à l'aide une pelle mécanique. Le travail fut ensuite terminé à la main afin de ne pas endommager l’appareillage du mur médiéval qu’il avait retrouvé ici. La coupe en profil, longue de 3,50m et profonde de 1,50m, s’étirait du nord au sud. Sa largeur mesurait 0,50m.
Au nord et sur le fond existait un aménagement sommaire. Une pierre plate, carrée et équarrie, reposait à plat dans un lit de pierres et de terre. C’est sous cette pierre faisant peut-être office de margelle et servant probablement à poser les cruches et les pots, que nous trouvâmes les céramiques protohistoriques. Cette installation matérialisait l’existence de la source que nous recherchions et qui semble dater de l’Âge de Fer.
Le milieu de la tranchée était comblé de pierrailles provenant probablement de la destruction des digues de la vallée. Comme dans la fosse monumentale, ce remplissage était venu buter contre le mur médiéval qui barrait la vallée au sud. Ce mur médiéval est, sans contestation aucune, le prolongement de celui élevé dans le cadre F. Il est construit selon le même principe et il est de même hauteur. Il se dirige en droite ligne vers le chemin qui dessert le lavoir et sa source.
Stratigraphie de la Coupe
La tranchée fut percée sur une profondeur de 1,40m, de la largeur de la pelle employée pour cet usage.
0 à -0,30m - Terre végétale.
-0,30 à -0,80m - Gros cailloutis instables sans terre provenant de la destruction des digues de la vallée.
-0,80 à -1m - Terres et pierres mélangées et clou en fer.
-1 à -1,40m - Terre argileuse grise et blocs de pierres dont la dalle plate carrée, tessons de céramiques protohistoriques.
Le mur médiéval élevé au sud commençait à -0,20m et descendait jusqu’à –1m. Aucune fondation n’assurait sa stabilité. C’est à 1m de profondeur et au pied de son parement qu’a été ramassé un clou en fer. Entre ce mur et le lieu de la source, le remplissage de pierres était identique à celui vidé en F.
Nature du Mobilier Retrouvé dans la Coupe en Profil T6
Le mobilier recueilli à l’intérieur de cette coupe en profil, revêt une importance primordiale pour la connaissance de l’occupation humaine du site des Laquais. Il complète le mobilier lithique que nous avons amassé durant les deux campagnes précédentes, dispersé en plusieurs points de la superficie fouillée.
Les silex et céramiques trouvés cette année comblent nos lacunes sur la fréquentation du site dès la préhistoire. Ils apportent des précisions inestimables sur les hommes de cette période et leur implantation sur les hauteurs surplombant la vallée.
Ce fut un moment fort de notre travail. Un après-midi entier a été consacré à dégager méticuleusement la coupe en profil T6 : les uns grattant au fond, les autres brossant et lavant les tessons dans l’eau de l’aqueduc collecteur. La reconstitution de la poterie dont plusieurs morceaux avaient été retrouvés enrichit le trésor de l’opération 2001.
Cet événement avait également un autre aspect important. Il nous apprit que les premières peuplades préhistoriques venaient ici chercher l’eau et résidaient à proximité, très certainement sur les hauteurs que nous venons d’évoquer. Les tessons de céramique recueillis au font de la tranchée de T6, furent expertisés par M. José Gomez De Soto qui les data du Premier Âge du Fer.
Datation et Occupation du Site
Cette source et celles jaillissant tout près, ont par la suite vraisemblablement incité les Romains à s’installer aux Laquais, puis les populations plus récentes ont pris le relais. Le site fut pratiquement toujours occupé ou visité au cours des siècles suivant, pendant presque cinq millénaires.
Le passage régulier des hommes aux abords de l’aqueduc dès la préhistoire nous était connu depuis la première opération archéologique de l’année 2000. Nous savons qu’ils vivaient sur les plateaux surplombant le bourg car nous avons retrouvé plusieurs de leurs habitats fortifiés mais aujourd’hui nous avons la certitude qu’ils s’arrêtaient sur les lieux. Ils y venaient probablement guetter le gibier, à l’affût. La pointe de flèche émoussée, ramassée dans le cadre O, atteste cette pratique de la chasse. Nous savons aussi, que comme les bêtes qu’ils chassaient, ils venaient boire à cette source et y puiser de l’eau dans des récipients pour la ramener dans leurs habitats. Les poteries reconstituées prouvent cette quête de l’eau. Ces divers objets associés avec ceux de l’année précédente mettent en évidence une occupation humaine fréquente qui s’est prolongée longtemps dans le temps à l’époque de la préhistoire.
L’âge de Bronze Moyen et la période de l’Artenac plus précisément, sont attestés sur le site et son environnement immédiat.
ETUDE ET REPARTITION DU MOBILER
RECUEILLI LORS DE L'OPERATION ARCHEOLOGIQUE DE L'ANNEE 2001
Cadre O
La Période Protohistorique
Le Mobilier Lithique :
Lors du premier sondage en 1999/2000, nous avions noté que la source des Laquais devait être un lieu privilégié pour l’homme dès les temps anciens.
Ce deuxième sondage, nous permet d’affiner ces dires :
- un dans le cadre O1,
-
deux dans le cadre O2, dont une flèche perçante à pédoncule et ailerons. La pointe de la flèche est brisée comme le pédoncule et les deux ailerons. L’inclinaison symétrique des fractures (pointe, pédoncule - ailerons) montre que le trait s’est écrasé sur une partie dure, et que la hampe a brisé dans le choc la partie inférieure de la flèche (pédoncule - ailerons). Le matériau employé est un silex blond qui est recouvert d’une patine blanchâtre. La retouche est plus ou moins parallèle et couvrante, puis plus étroite vers les bords. Cette pièce s’inscrit dans une période de l’Artenac, 2300 – 2000 avant J.C., et plus précisément dans un Artenac final.
La Céramique Protohistorique :
En alignement du carré F10, l’eau remonte en hiver en un point précis, sous forme d’une petite résurgence.
Le sondage à cet endroit a montré un structure sommairement aménagée sur laquelle reposait une pierre plate carré, visiblement taillée.
Sous cette pierre, onze tessons, furent découverts. Cette céramique non tournée, probablement un fragment de coupe, est lissée sur ses surfaces intérieure et extérieure et possède une carène. Le bord est arrondi, avec une lèvre dont la face intérieure a été aplatie. La pâte est noire intérieurement, montrant une réalisation en cuisson réductrice, puis oxydante. Les surfaces sont en effet de couleur marron légèrement orangé. On y aperçoit un dégraissant très fin de quartz et de calcaire pilé. L’épaisseur des tessons varie de 0,4 cm. à 0,5 cm. vers la carène. Cette céramique fut restaurée et montrée pour expertise à M. José Gomez De Soto, qui les data du Premier Âge du Fer.
Huit autres tessons, appartenant au moins à trois céramiques y étaient associés :
- Tessons à paroi fine, pâte, surfaces intérieure et extérieure de couleur noire, au dégraissant de quartz et calcaire pilé, épaisseur : 0,5cm.
- Tessons à pâte noire, surface intérieure marron, extérieure orangé, dégraissant de grains de quartz et calcaire pilé, épaisseur : 0,7cm
- Tessons à pâte noire, charbonneuse, surfaces intérieure et extérieure orangé, dégraissant de quartz et calcaire pilé. Epaisseur : 1cm.
L'Epoque Antique
Les Eléments de Construction :
Cadre O : Des fragments de tegulae sont présents dans tout le sondage. Leur concentration est plus prononcée dans le carré O3 du cadre O. Un fragment de plinthe en calcaire était présent dans ce carré. Deux fragments de brique de décoration figuraient dans le carré O4, avec deux éléments de tubuli d’hypocauste. Ce dernier carré est également riche en fragments d’enduit, dont un peint, avec des motifs bleu, violet, rosâtre. Ces enduits se retrouvent également dans les carrés O2, O3. L’enduit décoré est accroché à un béton blanc légèrement rosé dans lequel figurent de la tuile pilée et des grains de quartz. L’enduit, par lui-même, possède une épaisseur de 7mm. Il ne présente pas dans sa composition, d’éléments de tuile pilée, mais du sable très fin. Quelques fragments de béton rose viennent se mêler à ces enduits.
Un fragment de mosaïque primitive, comportant huit tesselles en verre bleu très altéré, étaient collées dans un béton blanchâtre, où figurent quelques éléments de tuile pilée. Il fut exhumé du carré O2.
Un clou à tête large, de section carré, semblant appartenir à cette époque, a été trouvé dans le carré O1. Dimensions : longueur 7cm, tête L. 4cm , l. 2 à 3cm.
La Céramique Gallo-Romaine :
La Sigillée :
Quelques tessons difficilement exploitables ont été récupérés dans les carrés O2(2), O3(2), O4(1) du Cadre O:
- Tesson carré O2 : la pâte est rose saumon, le vernis de la face intérieure est rouge, celui de la face extérieure présente un aspect plus foncé. Ce tesson est altéré, son épaisseur est de 0,5cm.
- Tesson carré O3 : bord de jatte ? Il possède les mêmes caractéristiques que le précédent, mais le vernis de la face intérieure est rouge foncé. Epaisseur : 0,5cm , 1cm au bord. Cette céramique est comparable à certaines provenant d’un puits fouillé à Saintes dont le comblement a été daté de la période 70 – 80 de notre ère (d’après M.H. et J. SANTROT – D. TASSAUX).
La Céramique Commune Grise :
Cadre O : On note une forte concentration de céramiques à pâte grise, dans les carrés O1(19), O3(23), puis en quantité moindre dans O2(2), O4(4) et O5(2).
La pâte est fine et dure, de couleur grise avec parfois un dépôt blanchâtre. Deux tessons sont décorés à la molette avec un motif à la plumette (IIIe, IVe).
Deux fragments très altérés, tournés, se raccordant, possédant une pâte rougeâtre et des surfaces noirâtres, pourraient appartenir à cette période : carré O4, cadre O.
Cadre F : Les quatre premiers carrés de ce cadre, prolongeant perpendiculairement les carrés du cadre O, sont riches en éléments antiques.
Ils confirment la présence d’une structure : On retrouve de nombreuses tegulae en F10, F11, F12, la présence d’enduit en F11, de brique de décoration en F11 et de céramiques grise en F10, F11.
L'Epoque Moderne
La céramique est variée et très fragmentée. Certains tessons possèdent une glaçure vert olive. La pâte est souvent rougeâtre ou orangée avec de fines inclusions micacées. La répartition est abondante dans le carré O2(15).
Plusieurs ossements sont présents sur le sondage, les dents de ruminants y sont bien représentées, carrés O1, O2, O3. En cadre O1, un os long a été scié longitudinalement pour être vidé de sa moelle.
Cadre F : La céramique moderne était surtout présente dans les carrés F11 et F9.
CONCLUSION
La source de l’âge de Bronze
L'occupation humaine du site et son installation à proximité des sources, de façon temporaire ou permanente, fut favorisée par l'abondance de l'eau dans cet environnement sauvage aux époques les plus reculées. Ce fut un lieu de puisage mais aussi de chasse car le gibier venait vraisemblablement se désaltérer à ces sources.
La présence la plus ancienne relevée dans la prairie des Laquais remonte à la période de l’Artenac, - 2300, – 2000 avant J.C., et plus précisément dans un Artenac final, comme nous l'avons déjà mentionné. On peut supposer que lors des millénaires qui suivirent, les hommes fréquentèrent toujours les lieux, même si la seconde occupation relevé sur la site de la fouille archéologique, indique avec la découverte d'une autre résurgence et des fragments de poterie recueillis à 1,40m de profondeur, une présence humaine au Premier Âge du Fer.
Mornac, trouve donc ses origines, il y a quelque 4000 ans.
Un Habitat Antique
Ce fut la troisième occupation du site. Elle fut sédentaire, car les nombreux vestiges de bâtis retrouvés l'attestent formellement. La richesse monumentale contenue dans cet environnement avec les fragments de tegulae, l’incrustation d’un granulat de brique et de tuiles gallo-romaines dans le radier de AO, les enduits, les tesselles, le nombre de tessons de céramiques appartenant à de la vaisselle domestique retrouvée en abondance, témoignent de ce passé gallo-romain in situ.
Le Haut Moyen-Âge
Au cours de notre sondage 2000, nous avions collecté un tesson se rapportant à l’époque carolingienne. Durant le sondage 2001, nous n’avons pas ramassé d’autres objets de cette période.
Seule la légende se rapportant à l'empereur Charlemagne nous rappelle que peut être Charlemagne est venu à deux reprises à Mornac, ce dont nous doutons fortement, car que serait -il venu faire dans ce bourg perdu de Charente où aucune structure importante pouvait l'accueillir avec sa cour.
Tout au plus pouvons-nous supposer qu'à cette époque, un individu vient à la source pour puiser de l'eau et cassa sa cruche sur le site.
Un Biotope Médiéval et sa Gestion de l'Eau
Un réseau hydraulique Médiéval à grande échelle
Nous pourrions presque dire aujourd’hui qu’il était logique de trouver cet l'Aqueduc Origine (AO)en cet endroit. La découverte de AO donne au site un troisième aqueduc indépendant d’un point de vue hydraulique aux deux autres monuments.
Nous avons un aqueduc qui fut peut-être « branché » sur cette source car celle-ci ne se trouve qu’à quelques mètres à l’ouest. Nous pouvons supposer également que AO fut édifié avec les matériaux provenant des ruines de l'établissement gallo-romain retrouvé dans la Fosse Monumentale.
Il est probable que Mornac fut doté d’un réseau hydraulique construit à grande échelle au Moyen âge, bien avant l’édification du mur médiéval retrouvé dans la fosse du cadre F. Ce réseau comprenait quatre barrages : les Ballans, les Laquais et deux aux Theils. Des digues contenaient les eaux dans ces bassins aménagés. Dans le corps de celle située tout en haut de la vallée fut creusé un puits ou un siphon qui eut peut-être pour rôle de jouer la soupape de sécurité lors des gros d’eau. De nos jours, seule l’observation du profil de la vallée des Laquais nous indique leur emplacement. Il semble même qu’un petit canal creusé dans la terre à flanc de coteau évacuait le trop plein vers l’aqueduc primaire. Mais nous n’avons pu prouver son existence. Près du site des Laquais, le puits désaffecté pourrait appartenir à cet ensemble, tout comme AO.
Le Mur Médiéval et la Fosse Monumentale
Nous ne pouvons donner de datation à ce mur. Nous en avons dégagé une trop faible distance. Sa longueur est rectiligne car nous l’avons retrouvé dans l’axe en T6 et son assemblage est identique. Nous savons qu’il est postérieur à AO car il a incorporé dans sa structure l’élément que nous avons retrouvé dans un but domestique. Un calage grossier mais efficace assure un blocage apparemment inutile car la structure est solide. Il est possible qu’il ait été mis en place pour l’esthétique du monument car le parement du mur à l’intérieur de la fosse est superbement mis en valeur. Les pierres sont toutes ajustées et offrent au regard un dessin régulier. Le travail a été exécuté avec soin. La face dégagée côté prairie ne possédait pas cette physionomie. Les moellons étaient de forme irrégulière et posés sans aucun goût.
Est-ce la construction de ce possible habitat médiéval sur les ruines gallo-romaines qui entraînèrent la destruction partielle de AO ou sa réutilisation pour un autre emploi ? Nous ne pouvons l’affirmer. Ce que nous savons en revanche, c’est que la destruction du réseau hydraulique balaya tout sur son passage. L’habitat médiéval ou quel que soit le monument fut rasé. Seul le mur et l'aqueduc subsistèrent. Le remplissage de la vallée qui découla de cette catastrophe vint s’agglutiner contre le mur que nous connaissons.
Côté est, au point où se situe l'Aqueduc AO et où se termine ce mur, le remplissage de la vallée se retrouve. Derrière le mur médiéval, ce remplissage de pierres a disparu. Il réussit à contenir la forte poussée et protégea de la destruction AO. L'Aqueduc AO et ce mur ne furent pas construit comme l'Aqueduc AC au XVIIe/XVIIIe siècle sur les ruines de l’écroulement des digues mais sur les vestiges gallo-romains, reconnus dans la Fosse Monumentale.
Transformation, Dégradations et Destructions du Monument
On ignore à quelle époque commencèrent les premières déprédations. Certaines furent naturelles, d'autres commises par intérêt personnel ou encore par ignorance et les dernières pour le bien de la communauté. Mais il probable que cela commença de façon naturelle, puis l'Antiquité apporta vraisemblablement des transformations importantes pour l'habitat qui s'installa à proximité de la source. Au Moyen Âge la construction de l'Aqueduc AO et du bâti médiéval avec son mur sur les ruines gallo-romaines bouleversa également le site. Enfin le XIIe/XVIIIe siècle transformera les monuments hydrauliques et verra apparaitre le lavoir que nous connaissons aujourd'hui avec son Aqueduc collecteur (AC). C'est vraisemblablement au XVIIIe siècle que sera percé l'Aqueduc Primaire (AP)dans le coteau.
Puis en août 1841 surviendra, la première affaire municipale. Un habitant de la commune prélève pour son compte une partie des eaux du Rouissoir. Cette eau était détournée en direction d’un pré. Elle suivait le chemin actuel du lavoir et passait sous la chaussée. Un conduit existait anciennement en parallèle et ce propriétaire l’avait fait agrandir avec l’accord du Maire. Ce fossé amenait les eaux dans son pré. Cet homme avait fait construire un mur et y avait pratiqué un trou pour l’écoulement au pied de celui-ci. Dans un constat d’huissier daté du 13 juillet 1842, il fut prié de tout remettre en l’état et de détruire le mur.
Dans un autre acte du 24 décembre 1842, on mentionne que dans «la dernière année qui a précédé le trouble, (le propriétaire) était en possession d’une partie des eaux sortant du lavoir établi près le Communal, en les recevant dans un fossé qui traversait au moyen d’un petit arceau, le mur de clôture du pré et qui se prolongeait dans toute la longueur du dit pré en allant de l’est à l’ouest. Attendu que les témoins de la contre-enquête n’ont pas détruit les faits en possession de M… ».
Ces quelques lignes lues dans cette minute notariale datant du 24 décembre 1842 sont très importantes. Elles sont peut-être la preuve de l’existence d’un autre ouvrage. Le fossé est peut-être la tranchée ou la galerie de celui-ci et il était peut-être voûté si l’on prend en considération l’indice du petit arceau.
Il n’y eut pas que l’aqueduc qui subit des transformations. Dans un des registres de délibérations du Conseil Municipal de Mornac datant de 1918 à 1920, il fut décidé de doter le lavoir d’une toiture.
Pour cela l’entreprise MARIANO de L’Isle D’Espagnac détruit en partie les murs du XVIIe/XVIIIe siècle et construit des piliers en béton. Elle installe une pierre à laver pour les lavandières. Ces travaux seront exécutés pour le bien de la communauté.
Enfin, comme nous l’avons dévoilé déjà dans notre rapport de l’année 2000, les dégradations du site se poursuivent car, entre 1932 et 1935, le monument existait tel que nous l’avons découvert en 1997.
Voici pour la petite histoire de l’aqueduc des Laquais le résultat de nos investigations. Petit à petit les lavandières ont abandonné le lavoir et ses bassins. L’eau courante et la machine à laver leur ont offert une vie meilleure et l’usage du site fut progressivement délaissé. Il a sombré dans l’indifférence et la désuétude. Mais aujourd’hui, c’est devenu un lieu de promenade agréable et très fréquenté par les habitants du bourg, les promeneurs et les visiteurs qui découvrirons le site, lors des journées du patrimoine de l'année 2000.
Note : "
Etude du Site Archéologique, Rapport SRA et Texte de l'Article
Daniel BERNARDIN - Responsable des Opérations Archéologiques
Plans et Dessins
Daniel BERNARDIN - Bernard FABRE - Alain TEXIER - Sébastien DUCONGE
Intervenants sur le site
Daniel BERNARDIN - Jean-Claude AUPY - Bernard FABRE - Matthieu MOUNIER - Alain MINCET - Sébastien DUCONGE - Richard Lafond - Eric DELMAS - Michel CHAUVIN - Claude BREGE - Pierre-Emmanuel BREGE - Sébastien DAULON - Jean-Marie TEXIER - Nathalie JOUSSEAUME - Cindy BRETHONNET.
Aide Logistique
Christian GUILLEBAUD - Entreprise de TP - José DE OLIVEIRA - Entreprise Bâtiment - Jean-Marie JOUSSEAUME - Entreprise Bâtiment - Michel GUILLEBAUD - Artisan retraité - Fracis GOUMAIN -Artisan Menuisier, Ebeniste - STINE PHOTOS à L'Isle d'Espagnac - Cabinet LARROQUE à L'Isle d'Espagnac.
Conseillers Techniques et Scientifiques
Jean-Louis TILLARD - Céramologue UMR 126 du CNRS - Jean-François BUISSON - Archéologue - Didier RIGAL - Archéologue - UMR 5608 - Jean Ben AOMAR - Contrôleur- Responsable de l'Entretien et Maintenance des Réseaux d’Assainissement – Grand Angoulême - Joël BOURGEOIS - COMAGA - Richard LAFOND - Rémi SARDIN -Responsable des Services Techniques, commune de Mornac.
Références (bibliographie, archives)
Christian VERNOU - Carte Archéologique de la Gaule - La Charente 16 - Fondation Maison des Sciences de l'Homme - Paris - 1993
Jean-Louis ANDRIEU - Techniques de Constructions des Aqueducs sur les territoires des Cités romaines de Béziers et Narbonne - Les Aqueducs de la Gaule Romaine et des Régions Voisines
Edité par Robert BEDON - Université de Limoges - Centre de Recherche A. PIGANIOL 1997
Didier RIGAL - L'Aqueduc Antique de Cahors - Les Aqueducs de la Gaule Romaine et des Régions Voisines - Edité par Robert BEDON - Université de Limoges - Centre de Recherche A. PIGANIOL - 1997
Abbé P. LESCURAS - Le Pays de Touvre et de La Braconne
Roger FACON - Recueil des Lieux-Dits de La Charente - Mémoires de la SAHC - 1994 - Edition COQUEMARD - Angoulême - 1965
Fabrice PEYRAUD - Rivières du Sud Angoumois - 1991
Constat d'Huissier de Justice - Mornac 6 Août 1842 - Archives Départementales de la Charente - Série O - 1826/1897
Constat d'Huissier de Justice - Mornac 31 Août 1843 - Archives Départementales de la Charente
Registre des Délibérations du Conseil Municipal de Mornac de 1918 à 1926.
Registre des Délibérations du Conseil Municipal de Mornac - 24/06/1932 - 05/09/1957
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